Infirmier en pratique avancée en addictologie : des points de bloquage et quelques perspectives

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Article rédigé par Alexandre Picard 7 septembre 2023
En 2016 était créé le statut d'infirmier en pratique avancée. Cette évolution répondait à d'importants enjeux de santé publique : attractivité et diversification des parcours professionnels, démographie des professionnels de santé, dépenses de santé… Autant de sujets qui sont toujours au cœur des préoccupations. Où en est-on 7 ans plus tard ? Quelles sont les implications pour le secteur de l'addictologie ?

Sept ans après la création des infirmiers en pratique avancée, un état des lieux mitigé

La loi de 2016 de modernisation du système de santé a créé la possibilité pour les infirmiers et infirmières d’exercer en « pratique avancée » après une formation de 2 ans de niveau master. Entre 2018 et 2021, les décrets ont prévu l’ouverture de formations vers cinq typologies d’intervention :

  • les pathologies chroniques stabilisées et les polypathologies courantes en soins primaires (depuis 2018) ;
  • l’oncologie et l’hémato-oncologie (depuis 2018) ;
  • la maladie rénale chronique, la dialyse, la transplantation rénale (depuis 2018) ;
  • la psychiatrie et la santé mentale (depuis 2019) ;
  • les urgences (depuis 2021).

En juillet 2023, la Cour des comptes a publié un audit flash donnant des premiers éléments de contexte et de bilan au niveau national sur l’implantation de ces « nouveaux » professionnels. La juridiction financière note notamment une mise en œuvre moins rapide que prévue du point de vue du nombre de professionnels formés : celui-ci est bien en dessous des objectifs initiaux (581 en 2021 contre 3000 prévus). Par ailleurs, aucune donnée n’est disponible concernant les infirmiers en pratique avancée (IPA) aujourd’hui en exercice dans les établissements hospitalier et médico-sociaux. Seules les IPA exerçant en libéral sont identifiés grâce au conventionnement avec l’Assurance maladie.

Les éléments soulevés par la Cour des comptes rejoignent les nombreux constats que font les adhérents de la Fédération Addiction, notamment :

  • le coût de la formation peut être prohibitif pour une structure et les possibilités de prise en charge sont limitées ;
  • dans un contexte de tension des ressources humaines, il est compliqué pour un établissement de se passer d’un professionnel pendant les deux années de formation ;
  • le nouveau statut acquis à la suite de la formation n’est pas toujours prévu par les grilles salariales ;
  • il existe des réticences de la part des médecins à déléguer des compétences aux IPA.

En 2023, la loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé ouvre de nouvelles possibilités allant vers une plus grande autonomie des IPA sur le terrain : consultation sans adressage par un médecin, évolution des forfaits de prise en charge par l’assurance maladie, primo-prescription de certains produits de santé ou examen, etc. Il reste à voir comment les décrets d’application permettrons la mise en œuvre de ces nouvelles missions et compétences des IPA.

L'audit flash de la Cour des comptes sur les IPA

En l’addictologie dans tout ça ?

En 2020, la Fédération Addiction avait participé à des travaux visant à produire un référentiel de compétence et un référentiel de formation pour des IPA en addictologie.

À ce jour, il n’existe toujours pas de formation avec la mention « addictologie ». Cependant, certaines universités, qui ont une autonomie sur la construction de leurs formations, ont intégré de manière plus ou moins importante les pratiques addictives dans les maquettes de la mention « psychiatrie et santé mentale ». Par ailleurs, dans les établissements, la pratique est soumise à la création de protocole avec un médecin psychiatre de la structure ou bien avec un professionnel exerçant en ville.

Mais en l’attente des évolutions permises par la loi de 2023 et dans un contexte de pénurie médicale, mettre en place un poste d’IPA dans une structure spécialisée en addictologie n’est définitivement pas simple. La Fédération Addiction restera mobilisée avec ses partenaires pour suivre les perspectives d’évolution et faire valoir le besoin pour les structures auprès des pouvoirs publics.

Des questions sur le statut d’infirmier en pratique avancée ? Contactez a.picard@federationaddiction.fr