Notre histoire

La Fédération Addiction dans sa forme actuelle est née en 2011 mais elle trouve son origine dans le travail et les combats des femmes et des hommes qui, depuis plus de cinquante ans, accueillent et accompagnent les consommateurs de drogues licites ou illicites. La Fédération est riche de cette histoire qui va de l'émergence des questions de toxicomanie dans les années 60 et 70, aux combats pour la réduction des risques, en passant par les enjeux du financement et de la structuration des dispositifs avec leur élargissement progressif à l’ensemble des addictions y compris comportementales.

Les années 70 et 80 : l’émergence d’un secteur spécialisé

Les premières structures de soin dédiées aux personnes en situation d’addiction naissent dans les années 1970. Il s’agit d’abord de dispositifs sanitaires mais, en 1975, la loi crée le secteur médico-social qui permet la naissance de dispositifs de soins spécialisés en alcoologie et en toxicomanie. À l’époque, les filières de prises en charge étaient en effet séparées selon les produits d’addiction : alcool, tabac, drogues illicites…

Ainsi, à partir des années 1970, des équipes pluridisciplinaires se mettent en place au sein de centres spécialisés de soins aux toxicomanes (CSST) avec une conception multidimensionnelle, biopsychosociale de la toxicomanie et des dépendances, perçues comme résultant de la rencontre entre un produit, une personne et un contexte socio-culturel.

Du côté de l’alcoologie, les centres d’hygiène alimentaire (CHA) sont créés en 1975 avec l’objectif principal d’aider les buveurs excessifs sans pathologie psychiatrique associée à modérer leur consommation dans un cadre de médecine de la nutrition..

L’Association nationale des intervenants en toxicomanie (ANIT) est fondée en 1980 afin de rassembler les intervenants en toxicomanie, toutes professions confondues (médecins de diverses spécialités dont des psychiatres, psychologues, éducateurs spécialisés, assistants sociaux…) et indépendamment du champ d’intervention (CSST, prévention spécialisée, accueil, cure et postcure, psychiatrie, hôpital public ou encore Éducation nationale). Les années 1970 sont une période de forte stigmatisation des usagers perçus comme de réels dangers pour les familles et la société. Dans ce contexte de « guerre aux drogues », des intervenants s’inscrivent contre ces logiques de stigmatisation et d’exclusion et militent pour sauver des vies, reconnaître et faire respecter le droit à l’anonymat et la gratuité des soins, pour la confidentialité de la parole des usagers et la reconnaissance de leur citoyenneté.

Dans les années 80, le dispositif d’alcoologie poursuit sa structuration. En 1983, les CHA sont transformés en centres d’hygiène alimentaire et d’alcoologie (CHAA) : ils deviennent alors des centres de soins, d’accueil et de prévention. S’amorce ainsi une compréhension bio-psycho-sociale du soin des personnes présentant des problématiques liées à l’alcool.

Années 1990 : le combat pour la réduction des risques

Au milieu des années 1980, la nécessité d’une politique de réduction des risques (RdR) se fait jour et devient de plus en plus urgente dans les années 90 pour faire face au drame sanitaire de l’épidémie de VIH/SIDA. L’enjeu est de faciliter l’accès des usagers à du matériel d’injection stérile et à des traitements de substitution aux opiacés (TSO) pour réduire la contamination. Après de nombreux débats, l’ANIT publie en 1994 le manifeste « Pour une politique française de lutte contre les toxicomanies. Changer de cap ! » : elle se prononce en faveur de l’intégration des traitements méthadone dans les centres de soins et pour la révision de la loi en vue de la « dépénalisation de l’usage de toutes les drogues » et d’une forme de « légalisation du cannabis ».

La même année, le ministère de la Santé met en place des centres méthadone et des programmes d’échange de seringues mobiles (avec des bus) ou dans des automates. Les « boutiques », préfiguration des centres d’accueil, d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD), sont des premiers centres dédiés à la réduction des risques. Il faudra cependant attendre 2004 pour que la réduction des risques soit enfin reconnue et mentionnée dans la loi.

Parallèlement, 1994 voit la création de la Fédération française des centres d’hygiène alimentaire et d’alcoologie (FFCHAA) afin de défendre la place des CHAA dans les dispositifs sanitaires et sociaux. La FFCHAA prend le nom de Fédération française de l’alcoologie ambulatoire (FFAA) en 1999.

Années 2000 : la reconnaissance des addictions

Jusqu’à l’apparition du concept d’addiction, les questions d’alcool, de tabac et des drogues illicites étaient séparées dans l’organisation des dispositifs de soins. Un tournant conceptuel s’opère à partir de la fin des années 1990. L’offre de soins ne se fait plus en fonction du produit mais reste cloisonnée en secteurs avec trois pôles d’intervention : la ville, le secteur sanitaire et le secteur médico-social.

Emblématiques de cette transition attendue par les professionnels et conformes aux données scientifiques, les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) sont créés en 2007. Ces dispositifs médico-sociaux entrent dans le droit commun et sont désormais financés par l’Assurance-maladie. La création des centres d’accueil, d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD) en 2006 entérine la reconnaissance d’un dispositif médico-social spécifique à la réduction des risques, après plus d’une décennie de combats, de débats et d’actions militantes.

Face à ces changements, en 2002, la FFAA devient la Fédération des acteurs de l’alcoologie et de l’addictologie (F3A). L’ANIT devient quant à elle l’Association nationale des intervenants en toxicomanie et addictologie (ANITEA) en 2008.

Partageant des valeurs communes, les deux associations se rapprochent progressivement et finissent par fusionner en 2011.

2011 : naissance de la Fédération Addiction

Après trois années de travail entre l’ANITEA et la F3A, la Fédération Addiction voit le jour le 1er janvier 2011. La nouvelle fédération est née de la conviction que les addictions ne peuvent être abordées sous un angle unique : elles sont multifactorielles et les réponses sont nécessairement transdisciplinaires.

Jean-Pierre Couteron, psychologue, en devient le premier président alors que Nathalie Latour en est la déléguée générale.

Ainsi, depuis maintenant plus de dix ans, la Fédération Addiction s’engage pour créer des réponses adaptées aux personnes concernées par les addictions, en mettant l’accent sur les savoirs expérientiels et les programmes probants dans un effort continu de synergie entre les apports scientifiques et l’expérience et les savoirs des professionnels, des usagers et de leur entourage.

Les combats se poursuivent : pour la réduction des risques — même si son inscription dans la loi en 2016 est une avancée importante — pour la prévention et l’intervention précoce et, plus généralement, pour la fin de l’illusion prohibitionniste et de la guerre aux drogues. La Fédération Addiction s’engage pour que le secteur de l’addictologie puisse mener au mieux ses missions avec des moyens financiers et humains adaptés et pour que les associations et les usagers soient pris en compte dans l’élaboration des politiques publiques.

En 2018, le psychiatre Jean-Michel Delile est élu président de la Fédération Addiction qui, depuis, ne cesse de renforcer son équipe et de faire évoluer son organisation pour répondre aux besoins du secteur. En 2022, Marie Öngün-Rombaldi devient déléguée générale.

« Pas de dogme mais la volonté de mobiliser des visions croisées et décloisonnées pour être au plus près des besoins des personnes sur le terrain et porter les propositions constructives que nécessite cet enjeu de société »
Jean-Michel Delile