Amendes « cannabis » : « Ce n’est pas l’automatisation de la sanction qui permet de mieux gérer un contentieux de masse »

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Article rédigé par Fédération Addiction 2 août 2022
Dans une tribune dans Le Monde, Yann Bisiou analyse l'échec de l'amende forfaitaire délictuelle « cannabis » qui a été généralisée en septembre 2020. Un bilan édifiant mais malheureusement pas surprenant…

Généralisé en septembre 2020, l’amende forfaitaire délictuelle est loin de remplir ses promesses. Dans une tribune publié par Le Monde, Yann Bisiou (maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’université Paul-Valéry Montpellier-III) analyse les chiffres du ministère de l’Intérieur.

Ces données révèlent notamment une politique pénale discriminatoire : les jeunes de 18 à 25 ans, qui représentent 32 % des consommateurs de cannabis, représentent 66 % des mis en cause par une amende forfaitaire. Et si 74% des jeunes consommateurs sont des hommes, ils sont 94 % parmi ceux qui reçoivent une amende. Comme le note Yann Bisiou : « ce sont les jeunes hommes des grands centres urbains qui sont prioritairement visés par les services de sécurité, l’essentiel des amendes forfaitaires délictuelles se concentrant dans les banlieues et quelques grandes métropoles : les Bouches-du-Rhône, la Seine-Saint- Denis, le Rhône. »

Un constat loin d’être surprenant : déjà en 2018, alors que l’amende forfaitaire était en débat, le collectif pour une nouvelle politique des drogues dont la Fédération Addiction fait partie craignait qu’elle n’accentue les pratiques discriminatoires et renforce le contrôle au faciès.

Dans sa tribune, Yann Bisiou revient également sur le faible taux de recouvrement de l’amende et sur le changement de paradigme qu’elle emporte :

L’amende « cannabis » marque une rupture radicale dans l’approche des problématiques liées à l’usage de stupéfiants. L’usager n’est plus un malade mais un délinquant.
Yann Bisiou