Oppelia Charonne a 50 ans ! Trois questions à son directeur, Abdou Ndiaye

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Article rédigé par Benjamin Tubiana-Rey 27 septembre 2023
En 1972, l'association Charonne ouvrait ses portes et l’accès aux soins aux « toxicomanes ». Depuis, beaucoup de choses ont changé mais l'association, devenue Oppelia Charonne, est toujours là et continue d'accueillir et accompagner les usagers et usagères de drogues. À l'occasion des trois jours de rencontres et débats organisés pour son anniversaire du 5 au 7 octobre, nous avons rencontré Abdou Ndiaye, son directeur.

Quelle est l’histoire d'Oppelia Charonne ? Comment la structure a-t-elle évolué depuis 50 ans ?

Abdou Ndiaye : L’histoire de Charonne débute en 1972 et se concrétise à partir de 1975 avec l’ouverture d’un premier foyer d’accueil pour « toxicomanes » à la rue des Haies, dans le 20e arrondissement de Paris. L’association se crée dans un contexte de forte stigmatisation sociale des usagers de drogues, renforcée par la publication d’une loi scélérate le 31 décembre 1970. Les toxicomanes sont dès lors pris dans l’étau d’un carcan sociétal qui leur afflige les marqueurs de malades manipulateurs, irresponsables voire dangereux… C’est l’audace de professionnels engagés qui a permis de construire une réponse humaniste.

Un changement de paradigme interviend dans les années 80 avec l’apparition du VIH : Charonne se singularise alors par son approche alliant aller-vers et réduction des risques. Celle-ci se veut pourvoyeuse d’accès à l’hébergement et au logement comme préalable ou concomitant aux soins en répondant aux besoins premiers et fondamentaux de sécurité des personnes.

Aujourd'hui, quels sont les projets en cours et les perspectives ?

Abdou Ndiaye : Charonne est aujourd’hui la structure parisienne d’Oppelia. Elle poursuit son ancrage dans l’hébergement, la réduction des risques et l’aller-vers. Plus récemment des dispositifs sont venus compléter cette offre : la création d’équipes psycho-sociales de médiation culturelle, un dispositif d’analyse de produits, une offre de logement à travers la co-fondation de deux groupements de coopération sociale et médico-sociale.

Sur le plan clinique, nous avons la consolidation d’un protocole de prescription de sulfate de morphine, le recours aux activités psycho-corporelles comme outil de soin en addictologie, l’accompagne psycho social de populations arabophones. Et nous sommes également actifs à l’international avec de nombreux partenariats engagés autour de projets d’accompagnement à la mise en place de la réduction des risques dans six pays francophones.

Les 5, 6 et 7 octobre vous organisez trois jours de rencontre pour l’anniversaire de l’association : à quoi peut-on s’attendre ?

Abdou Ndiaye : Dans le contexte actuel, le sens de l’engagement citoyen en particulier celui concernant l’exercice d’une mission d’aide à la personne est constamment mis à l’épreuve. Il nous a donc semblé important de redessiner la trajectoire des tentatives militantes qui ont été porteuses de transformation sociale.

Le choix de trois jours a pour objectif de proposer une lecture évolutive:

  • Le premier temps (jeudi 5 octobre) sera consacré à une rétrospective de l’après-guerre au début des années 90/2000. Un contexte marqué par un engagement militant en faveur d’aspirations de liberté et de changements de paradigme majeur dans les politiques de drogues.
  • Le deuxième (vendredi 6 octobre) pointera les enjeux actuels au regard des évolutions des besoins des usagers, des organisations médico sociales, des espaces urbains, des institutions….et la nécessité de penser des réponses inclusives.
  • Le troisième (samedi 7 octobre) poursuit la mise en évidence d’approches innovantes et offre l’opportunité d’un travail de prospective. Nous y convions un public hétéroclite à imaginer ses futurs souhaités en 2033 du point de vue des personnes, des produits et des environnements (triptyque cher à Claude Olievenstein, ancien président de Charonne).
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