Réduction des risques en prison : des parlementaires se mobilisent pour faire appliquer la loi
Neuf ans plus tard, une loi toujours pas appliquée
En 2016, le Parlement adoptait la loi de « modernisation de notre système de santé » qui prévoit l’application de la politique de réduction des risques (RDR) aux personnes en détention. Au lendemain de son adoption, plusieurs projets de décret d’application n’ont pas abouti, laissant la loi sans portage politique. Face à cette inertie, en 2022, huit organisations dont la Fédération Addiction ont déposé une requête auprès du Conseil d’état pour contraindre le gouvernement à adopter un décret. En 2024 le Conseil d’État a rejeté notre requête, considérant que la loi était applicable en l’état.
Pourtant, à ce jour, la loi demeure inappliquée. Sur le terrain, la mise à disposition de matériel de tout type est rare et dépend d’initiatives locales et de la qualité des échanges avec la direction de l’établissement voire d’initiatives individuelles de soignants, qui mettent à disposition discrètement du matériel avec le risque que les personnes détenues se voient reprocher par l’administration pénitentiaire de détenir ces outils.
Le Parlement se saisit de la question
Ces constats sont partagés par un récent rapport d’information du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale, publié le 10 juillet 2025. Les conséquences de l’inertie politique y sont mises en évidence : « Le Conseil d’État a pourtant précisé en avril 2024 qu’il ne nécessitait pas l’adoption d’un cadre réglementaire. Sur ce sujet, inscrit dans les feuilles de route successives, force est en réalité de constater qu’il n’existe ni cadrage national, ni véritable impulsion. La politique actuelle se résume à laisser les initiatives locales émerger ou non. »
Depuis la décision du Conseil d’État en 2024, la Fédération Addiction aux côtés de ses partenaires – Aides, l’Association des professionnels de santé exerçant en prison, Sidaction et la Ligue des droits de l’Homme – a poursuivi le plaidoyer auprès des parlementaires. Ce travail a abouti au dépôt, à l’Assemblée nationale par le député Jean-François Coulomme et au Sénat par la sénatrice Anne Souyris, de propositions de résolution visant à rappeler que la loi demeure inappliquée et à formuler plusieurs recommandations issues du plaidoyer interassociatif pour permettre enfin la mise en œuvre de la réduction des risques en prison.
Si elles sont adoptées par les députés et/ou les sénateurs, les résolutions — bien que non contraignantes — seront un signal du Parlement à l’exécutif afin qu’il prenne les mesures nécessaires pour appliquer la loi de 2016.